Qu’est-ce que la Kodakisation ?
C’est très complexe, la transition numérique, la gestion de l'innovation dans ce contexte très mouvant. Derrière les applis qui vous facilitent la vie et votre site web gratuit en trois clics, se cachent une multitude de pièges, de complexités, ramifications, innovations perpétuelles et pièges à grande vitesse.
L’objet de cette séance est d'analyse le cas complexe d'une grande société innovante dans son domaine, mais qui a raté le coche du numérique,un cas très concret :
l’entreprise Kodak
Innovations en rafales. C’est en 1881 que George Eastman, petit gratte-papier dans une banque, abandonne son boulot pour créer sa société. Sans aucune formation de chimiste, ce passionné de photo met au point un procédé révolutionnaire de plaque sèche. Auparavant, les plaques photographiques étaient recouvertes d’une gélatine qui les rendait difficiles à transporter et à manipuler. Il fonde ainsi l’Eastman Dry Plate Company avec Henry Strong, un ami de la famille qui possède une petite fabrique de cravaches.
Mais plus que la plaque sèche, le premier coup de génie d’Eastman sera une innovation conçue en 1885 : le premier film souple transparent. Il est vendu dans un appareil baptisé The Detective – une boîte en bois en forme de cube – que les utilisateurs renvoient au siège de la société à Rochester, dans l’Etat de New York, une fois utilisé, pour développement. En retour, ils reçoivent leurs photos et la boîte chargée d’une nouvelle pellicule. Avec ce premier slogan mythique : «You press the button, we do the rest» (Vous appuyez sur le bouton, nous faisons le reste). Car George Eastman est aussi un génie du marketing. C’est encore lui qui invente le nom Kodak : en 1888, comprenant qu’Eastman Dry Plate Company n’est pas un intitulé percutant, il a l’idée de créer un mot court pouvant se prononcer dans toutes les langues. Pour lui, en effet, Kodak est appelé à rayonner dans le monde entier.
Brownie, Retinette & Cie. Même volonté du côté des produits. A l’époque où les objets manufacturés portent généralement des noms de code à base de chiffres ou de lettres, il décide de baptiser ses appareils et ses films de façon à les rendre sympathiques : il y aura le Brownie en 1900, le Vest Pocket en 1912, le film Kodachrome en 1935, l’appareil Retinette en 1949 et plus tard le fameux Instamatic… Des produits iconiques qui n’avaient rien à envier à nos iPhone et iPad.
De fait, Kodak est un peu l’Apple du début du siècle dernier. La société vend des millions d’appareils dans le monde, crée des filiales en Europe (en 1897 pour la France), ouvre des usines en Grande-Bretagne et en Australie… En 1907, Kodak compte déjà 5 000 salariés, chiffre qui passe à 20 000 en 1927. A la tête d’un quasi-monopole mondial sur la photo grand public, Kodak va alors se diversifier dans le cinéma. C’est le début de la bataille qui l’opposera au français Pathé, à l’époque leader mondial de la pellicule ciné avec 80% du marché.
Un bras de fer transatlantique s’engage entre les deux monstres du business que sont George Eastman et Charles Pathé. Avec des passes d’armes dignes d’un film de gangsters. Ainsi, quand Charles Pathé décide, par mesure de rétorsion, d’arrêter de se fournir chez Kodak pour produire lui-même le support de ses films… «Eastman est arrivé dans le bureau de Pathé et a posé un revolver sur la table devant les administrateurs éberlués, raconte François Sauteron. Mais Pathé n’a pas cédé et Eastman a coupé du jour au lendemain tout l’approvisionnement de son rival.» Pourtant, cette guerre ne dure pas. En 1927, Pathé cède aux avances d’Eastman et fusionne sa société avec celle du géant américain : ainsi naît Kodak-Pathé.
Un pied dans le cinéma, l’autre dans la photo, le succès de Kodak semble irrésistible. En 1932, à 78 ans, George Eastman, conscient qu’il a conquis la planète, se suicide en laissant ce message : «Mon travail est fait, pourquoi attendre ?»
Dans la seconde moitié du XXe siècle, les succès sont toujours là, nombreux (l’Instamatic et ses déclinaisons), et la rentabilité reste forte (de l’ordre de 20%). Mais la société de Rochester connaît ses premiers ratés. Ainsi en 1950, lorsque la direction refoule Edwin Land, un ingénieur américain venu présenter un appareil photo instantané. Land s’en va fonder sa compagnie… Polaroid. Devant le succès de celle-ci, Kodak produit ses propres appareils photo instantanés, les Polavision. Mais la société, attaquée pour contrefaçon, est condamnée en 1986 à verser 3 milliards de dollars à son rival.
Kodak c'est 125 ans d'innovation :
"Our heritage is innovation, and our focus is imaging. We invented photographic film, creating the market for consumer photography more than a century ago ..."
Géant déboussolé. Refroidi par cet épisode, Kodak est alors atteint par une boulimie de rachats de start-up. Dans l’imprimerie, la pharmacie, la chimie, l’électronique… Des entreprises qu’il surpaye souvent. Le géant de Rochester devient un conglomérat fourre-tout. «On étouffait ces petites sociétés avec notre culture de grosse entreprise, notre “supermanagement”, nos contrôles qualité…» se souvient François Sauteron. Dans les années 1980, Kodak gagne encore énormément d’argent et atteint un pic avec 145 000 salariés. Mais, attaquée sur son cœur de métier par le japonais Fujifilm, qui avec ses prix agressifs et ses innovations futées (l’appareil photo jetable) réussit à prendre plus de 10% du marché américain, l’entreprise comprend qu’elle doit passer au numérique. Sans savoir comment. Elle débauche en 1992 le PDG de Motorola, George Fisher, pour amorcer la transformation. Sous son impulsion, la société sort un graveur de CD, développe pour Apple le QuickTake (considéré comme le premier appareil photo numérique grand public) et lance en 1996 un modèle hybride de numérique avec cartouche baptisé Advantix. Trois flops.
«Ils avaient imaginé un produit numérique mais avec un consommable, car c’est ce qui faisait vivre la société», explique Claude Desbrugères, directeur général d’Eastman Kodak France. Dans les années 2000, la chute s’accélère et elle est violente. La société est surprise par la vitesse de pénétration du numérique. Et sa gamme dédiée, EasyShare, finalement lancée en 2001, n’y change rien. Les nouveaux dieux de la photo sont japonais et se nomment Canon, Nikon, Sony et Panasonic.
Asphyxiée par une dette de 7 milliards de dollars, la société, qui a tenté une diversification tardive vers les services aux entreprises (impression, industrie graphique…), doit demander en 2012 la protection du chapitre 11 de la loi américaine des faillites. L’empire est démantelé, l’activité photo arrêtée, la licence de marque cédée à une société chinoise. KPP, le fonds de pension des retraités britanniques de Kodak, reprend lui l’activité d’imagerie et crée Kodak Alaris. En septembre 2013, Eastman Kodak sort du régime des faillites. Le géant d’antan, réduit à 8 500 salariés, s’est spécialisé dans l’impression sur papier pour les entreprises. Sur papier à l’heure de l’écran roi ? L’histoire aurait-elle le mauvais goût de se répéter ?
Les etapes marquantes :
1881 : George Eastman fonde l’Eastman Dry Plate Company, qui vend les premiers films souples de photo et deviendra Kodak en 1888.
1898 : Kodak invente le Folding Pocket, appareil de poche pliant, et le négatif 57 x 82 mm, la norme des décennies à venir.
1929 : La société sort sa première pellicule cinématographique, destinée aux films sonores. C’est le début de la fin pour le cinéma muet.
1935 : Le film Kodachrome est créé. C’est le premier film couleur amateur à rencontrer un succès commercial.
1957 : Lancement des Brownie Starmatic. La gamme comptera sept modèles vendus à plus de 10 millions d’exemplaires en cinq ans.
1963 : Apparition des Instamatic, appareils photo dont la pellicule tient dans une cartouche. Kodak en fabriquera plus de 50 millions jusqu’en 1970.
1975 : Kodak invente le premier appareil photo numérique mais ne le commercialise pas par peur de tuer le marché de la pellicule qu’il domine.
1976, Kodak est en situation de quasi-monopole.
1991, Kodak introduit le premier appareil photo numérique
Jusqu’en 1990, Kodak est consacrée comme l’une des marques les plus valorisées au monde (un peu comme Facebook ou Apple aujourd’hui).
En 2000, année des Jeux Olympiques de Sydney, dont Kodak est l’un des sponsors principaux, l’entreprise doit décider quel produit mettre en avant pour l’événement :
le film argentique, ou le numérique ? Finalement, Kodak optera pour l’argentique, avec une petite place pour le numérique.
A partir de 2003, c’est avec des téléphones plus qu’avec des appareils photos que les gens commencent à prendre leurs photos, tendance qui explosera avec l’introduction de l’iPhone en 2007.
2005 : Virage tardif dans le numérique avec le lancement de la gamme d’appareils EasyShare
2012 Dépôt de bilan de Kodak en .
2013 : Un an après avoir déposé son bilan et fermé 13 usines, Kodak repart avec 8 500 salariés.
http://www.rbj.net/!userfiles/image/Kodakcharts1982-2010.jpg
Il est possible d’avancer plusieurs explications possibles à l’échec de Kodak :
Kodak n’aurait tout simplement pas vu venir la révolution numérique ?
- Ce n’est pas le cas : c’est en effet Kodak qui a inventé la photo numérique en 1975.
La R&D de Kodak a bien travaillé sur la photo numérique, mais n’a pas réussi à la commercialiser ?
- Là encore ce n’est pas le cas. Kodak a introduit un excellent appareil photo numérique sur le marché dès 1991 et est devenu un acteur de ce marché, même si sa part de marché est toujours restée relativement faible.
Un manque de temps, l’innovation allant trop vite ?
- Cela ne tient pas non plus : entre l’invention en 1975 et le décollage du marché à la fin des années 90, il s’écoule au moins quinze ans.
Un manque de vision du management ?
- Loin de là. Dès 1981, la direction de Kodak n’ignore plus rien de la perspective de son marché.
Un manque d’expertise technique empêchant Kodak de basculer vers le numérique ?
- Au contraire, Kodak était très active dans le domaine et est à l’origine de très nombreux brevets, source de valeur de l’entreprise. Kodak n’est pas mort d’avoir ignoré la révolution numérique, ni d’avoir été incapable d’y prendre une part active !
https://www.youtube.com/watch?v=Nj4fIM-YT0M
Alors qu’elle est la vraie raison de l’échec ?
https://www.youtube.com/watch?v=dqwAZKrc6vw
De ne pas avoir parié sur le numérique en abandonnant l’argentique, sachant que la direction générale était convaincue que le numérique allait remplacer l’argentique.
Mais quand ? Nul ne le savait !A l’époque le marché de l’argentique était encore en croissance et très profitable et la direction générale pouvait donc se dire qu’elle avait encore le temps, qu’elle pouvait continuer à se déployer sur le marché de l’argentique, puis passer ensuite au numérique, « nouveau » marché minuscule.
Cependant avec l’argentique et le numérique, deux modèles d’affaires s’opposent.Dans son modèle, Kodak gagne de l’argent en vendant des films sur lesquels il obtient une très forte marge. Dans le numérique, il n’y a plus de films. L’argent se gagne en vendant des appareils, mais sur lesquels la marge est très faible.
De plus, alors que les films se vendent au détail, via un réseau de grandes et moyennes surfaces et de buralistes, les appareils numériques se vendent via des distributeurs spécialisés. Si Kodak maîtrise parfaitement le premier réseau, elle ignore tout du second et n’y a aucune légitimité : tout est à construire, ce qui nécessite un investissement gigantesque. Kodak sait ce qu’elle perd, mais ne sait pas ce qu’elle va gagner !
De plus, tous les actifs que l’entreprise a mis des décennies à bâtir, comme les laboratoires de chimie, les usines et les laboratoires de développement, qui font la force de l’entreprise et constituent son avantage concurrentiel, deviennent inutiles.Au final, l’analyse des deux modèles d’affaires montre que le numérique n’est absolument pas attractif pour Kodak. L’entreprise peut être convaincue de l’avènement du numérique, mais ne trouve pas le marché attractif. Kodak ne se résout pas à tout miser sur le numérique et décide de patienter. Le temps passe donc et nous sommes alors en 2000 et pour la première fois, le marché de l’argentique décline, c’est le début de la fin !
Kodak seule institution à ne pas savoir évoluer?
https://www.youtube.com/watch?v=4bORWFXJR00
Autres references
http://www.paristechreview.com/2012/02/20/kodak-lecons-faillite/
Kodak: les leçons d'une faillite Lorsqu'apparaissent des technologies de rupture, certaines entreprises sont totalement prises au dépourvu.
D'autres sentent le vent tourner et s'adaptent avec le temps. Et il y a celles qui, comme Kodak, ont vu venir et n'ont pas su réagir.
La faillite de la firme de Rochester marque la fin d'une série de faux-pas, sous-tendus par la peur d'introduire des innovations qui perturberaient son activité la plus rentable: la pellicule argentique.
http://philippesilberzahn.com/2012/01/23/fin-de-kodak-victime-dilemme-de-linnovateur/
La fin de Kodak, victime du dilemme de l'innovateur Le dépôt de bilan annoncé de Kodak marque la fin d'un long déclin d'une icône de l'industrie américaine.
Victime du développement de la photo numérique, Kodak n'aura pas réussi à se reconvertir à p...
Le cas Kodak : même les leaders se doivent d’étudier continuellement leur marché…
Depuis sa création en 1880 jusque dans les années 1990, Kodak a régné sur le monde de la photo.
Mais depuis quelques années l’icône du siècle de l’image semble s’être fait rattraper par ses concurrents et accumule les pertes. 2012 pourrait sonner le glas.
Quelques traces d'activités étudiants :
'ai trouvé le sujet de cette séance particulièrement intéressant. Etant un passionné de photographie (amateur) j'ai particulièrement aimé l'exemple très concret de cette semaine.
Je connaissais déjà le sujet, notamment grâce à une vidéo (que je vous conseille) d'un youtubeur spécialisé dans la photographie/vidéo qui parle à travers ses vidéos du monde de l'innovation et de la technologie.
La vidéo en question:
https://www.youtube.com/watch?v=ExJXAdfoRJ4
bonjour,
On se rend bien compte que Kodak a bien évidemment voulu "jouer la sécurité" car selon eux la mode du numérique n'allait être que bref ou au plus de passage. Malheureusement pour eux cela ne c'est passé ainsi, et comme beaucoup le disent une étude des marchés auraient été grandement nécessaire avant de prendre ce genre de décision. Ici elle aurait pu à coup sur éviter cela. Une citation me paraît intéressante :« Ils avaient de l’or entre les mains mais n’ont pas sur s’en servir » déclarera l’ancien directeur de Kodak France. On se rend bien compte de l'erreur qu'on fait les dirigeants de l'époque. Des dirigeants plus inspirés comme Nikon, Canon ou Fuji eux ont analysé leur marché et mis en place une stratégie efficace. Ce genre d'erreur doit nous servir a tous ! Nous devons en tirer des leçons, car on note maintenant qu'une grande entreprise doit sans cesse analyse son marché pour suivre les avancées. Car elle permet de savoir l'envie ou alors l'intérêt des clients sur certaines innovation pour ensuite en conclure ou non si c'est éphémère ou non.
Je mets en lien une video assez intéressante c'est une interview de Francois Sauteron auteur de "La chute de l'empire Kodak":
https://www.youtube.com/watch?v=Nj4fIM-YT0M
bonjour,
Alors, mon avis sur Kodak. Mes parents n'ayant pas eut la chance de voir mon sourie avant 1999 je n'ai pas connu la photo argentique sans doute est ce un appareil dont se servaient les dinosaures pour prendre des selfies. Néanmoins dans ma jeunesse j'ai moi même utiliser des appareils photo jetables de la marque Kodak pour mes voyages scolaires par exemple. Je pense donc que Kodak était encore une entreprise très présente sur nos marchés encore au début du 21è siècle. A mon avis Kodak a disparu non pas a cause d'un manque d'adaptation a son marché changeant mais plutôt a cause de sa trop bonne adaptation. En effet pour reprendre mon exemple, j'ai arrêter d'utiliser les produits Kodak a partir du moment ou je prenais mes photos avec mon smartphone, je pense donc que le marché de Kodak a disparu ou plutôt a fusionné avec le marché du smartphone. De nos jours, seul certains passionnés ou professionnels de la photo utilisent des appareils photo.En conclusion je pense que Kodak a loupé le coche en ratant la diversification des produits qu'ils proposaient, vous pouvez voir par exemple l'entreprise Fujifilm qui partageait le marché avec Kodak qui grâce a la diversification a survie a cette transition numérique. RIP Kodak.
https://www.youtube.com/watch?v=gLTPeC2OOOw
cette video montre plus en détaille les raisons de la faillite de kodak
Bonjour à tous !
j'ai bien aimé le sujet de la semaine, en regardant ces vidéos là, surtout celui de la chute de l'empire Kodak, ça me rappelle de la marque des téléphone Nokia, qui est était leader des téléphones à l'époque et maintenant presque disparu,
ci dessous une vidéo court expliquant quelque raisons de la faillite de Nokia.
https://www.youtube.com/watch?v=mkQb_N9Shy4
Bonjour ! J'arrive un peu tard, au moment des révisions. Faisant de la photo argentique, je connaissais l'histoire de Kodak, mais je n'avais pas conscience qu'ils étaient à ce point leader de leur marché à leur grande époque. J'ai trouvé une vidéo traitant de la marque avec humour, j'aime beaucoup ce créateur: https://www.youtube.com/watch?v=kJW8vnSFZl4.
Honnêtement cette vidéo m'a un peu surprise kodak a bercé les photos de mon enfance et ça m'attriste de voir cette fin aussi tragique donc j'ai fais quelques recherches de mon coté et j'ai pu trouvé une vidéo qui m'a aidé a comprendre :
https://youtu.be/rV-U0amhjvw
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